Virginia Woolf 1 (extrait à lire)

Virginia Woolf 1
Mis en partage par Lily
Histoire commencé sur un ailleurs lointain ....Voici les pages rescapées en attendant la suite. J'ai essayé de suivre la chronologie et j'ai numéroté les extraits.
Bonne lecture à vous tous et toutes

Pour ces raisons ,donc,et aussi parce et aussi parce qu'il était dans sa nature et dans ses habitudes de se soulager en exprimant ce qu'il ressentait ,il n'avait aucun scrupule à exposer à Stella ses souffrances et à exiger d'elle une attention constante et tout le réconfort qu'elle avait à donner . Mais quel réconfort pouvait-elle donner ? Le cas était tel qu'il n'y avait pas grand-chose à faire ; tout dépendait de ce qu'était Stella . Car soudain voilà qu'elle se trouvait sur un pied de très grande intimité avec un homme ,un écrivain d'un certain âge ,son beau-père,auquel elle n'avait jusque-là accordé que du respect et une affection de pure forme . La situation de Stella ,avant cette crise avait été à certains égards insolite ; en vérité ,toute sa personne ,telle qu'on la voit maintenant sous un éclairage nouveau quand on atteint l'âge qu'elle avait , était remarquable ; remarquable en soi et par son destin ; les difficultés ne lui furent pas mesurées dans la vie ; mais du fait de la briéveté des premières années et de leur caractère pour ainsi dire frémissant ,il m'est difficile d'affirmer quoi que ce soit en racontant l'histoire. Stella n'était pas brillante ,elle ouvrait rarement un livre ; et cela ,je crois ,eut une influence considérable sur sa vie , une influence disproportionnée , en fait. Elle exagérait ses insuffisances ; et à vivre très proche de sa mère ,elle mettait sans cesse l'accent sur leurs différences et s'infligeait un sentiment d'infériorité qui l'amena de très bonne heure à vivre dans l'ombre de sa mère.

Ta grand mère, de plus, comme je l'ai déjà dit ,avait des manières brusques et se montrait d'une indifférence totale aux blessures d'amour-propre si elle les infligeait pour le bon motif . Trait caractéristique chez elle , elle avait le sentiment que sa fille était ,selon selon expression ,une part d'elle-même ; et puisque cette part était la plus lente et la moins douée , elle n'avait aucun scrupule à la traiter durement, comme si les déficiences de Stella eussent été les siennes , ou d'offrir de l'aide sans plus d'arrière-pensée qu'elle se fût aidée elle-même . Un jour, avant le mariage de tes grands-parents ,alors que ton grand-père lui faisait observer qu'elle traitait Stella avec plus de sévérité que ses autres enfants , les deux garçons , elle fit la réponse que j'ai rapportée. Donc , enfant , Stella fut brimée et apprit de bonne heure à considérer sa mère comme une personne douée d'un pouvoir divin et d'une intelligence divine . Mais plus tard ,lorsqu'en grandissant elle eut acquis une beauté , un charme et un tempérament bien à elle , sa mère abandonna sa rudesse _ si tant est que le mot ait jamais été justifié_ pour ne plus manifester que ce qui l'avait justifiée : une affection et une complicité extraordinaires. Elles devaient toujours pour l'essentiel conserver cette relation que la nature avait peut-être ordonnée. Stella demeura toujours la ravissante suivante qui entretenait la flamme ardente de sa mère , se délectant de cet office et en faisant le premier des devoirs de sa vie .
Pas d'image pour cette partie

Mais par ailleurs, elle ne tarda pas à jouir aussi de l'effet de ses dons sur d'autres ; elle était ravissante , plus ravissante que ne le montrent ses portraits , car une bonne part de sa beauté immatérielle tenait aux contingences : le teint pâle et lumineux , la lumière changeante du regard , la fluctuation ondoyante de l'ensemble . Si par sa beauté ta grand-mère évoquait un buste de de la plus grande période de l'art grec , Stella avait une beauté grecque , elle aussi , mais d'une Grèce d'une époque postérieure et plus décadente , émouvant davantage par des lignes plus douces et une tournure plus molle . Mais dans les deux cas leur beauté les exprimait elles -mêmes . Stella était influençable et modeste ,mais outre ce qu'on appelle le charme ,le pouvoir d'ensorceler ,elle possédait une merveilleuse distinction et le don de frapper profondément l'esprit . Ce n'était pas , je crois , par ses propos ; car ils n'avaient rien que de très simples : mais par le clapotis de sa gentillesse et de son rire sur une forme , à peine devinée , qui semblait de marbre statuaire . Elle était si gaie, si féminine , et en même temps quelque chose en elle évoquait l'immense sérénité qui , chez sa mère , sous l'assaut des épreuves s'était transformée en une durable mélancolie .

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Protrait de femme mélancholique

Les "débuts" de stella, ses succés , ses amoureux , ranimaient chez sa mère de nombreux instincts depuis longtemps endormis ; elle aimait les jeunes gens , jouissait de recevoir leurs confidences , était considérablement amusée par le jeu et l'intrigue que tout cela représentait _ seulement , se plaignait -elle , Stella , craignant qu'elle ne fût fatiguée , tenait toujours à rentrer bien avant la fin de la soirée . Et voilà justement ce que , faute d'une meilleure image , j'ai appelé chez Stella " une forme de marbre statuaire " : tous ses succés n'étaient que de simples chiffons posés sur le souci constant qu'elle avait de sa mère ; c'était magnifique , mais presque excessif et cela comportait quelque chose de morbide , comme ces attachements entre deux êtres trop étroitement apparentés pour que la réflexion puisse suffisament intervenir entre eux . Ce que ma mère ressentait se communiquait aussitôt à l'esprit de Stella ; l'intelligence n'avait nul besoin d'examiner ni de critiquer ce que l'âme savait . Ta grand-mère eût sans doute préféré une résistance plus forte , une contestation intellectuelle qui
eût éxigé une attention d'un autre ordre . Il se peut fort bien qu'elle ait senti que le lien était trop étroit pour être sain , et qu'il pourrait empêcher Stella d'éprouver ces sentiments naturels auxquels elle-même attachait un si grand prix . La moindre séparation était exagérérément douloureuse . Stella fut pâle comme la mort pendant des jours avant son départ pour l'étranger , et elle eût une fois une crise de larmes épouvantable . " Qu'importe où l'on est , dit-elle , pourvu qu'on soit ensemble ! "

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Son inquiétude augmenta encore au cours des dernières années , alors qu'elle voyait la santé de sa mère s'altérer , et qu'elle n'arrivait absolument plus à lui assurer le repos dont elle avait besoin avant tout . C'était tout juste si elle ne sortait pas de son silence avec son beau-père de temps à autre pour protester ouvertement ; car il ne semblait jamais voir ce qui crevait les yeux , les occupations innombrables de sa femme , ni à quel point elle était épuisée . Puis au printemps 1895 on envoya Stella à l'étranger , et vers le milieu du voyage elle fut persuadée , par un signe dans l'écriture de sa mère ou par une phrase , qu'elle était malade à la maison . Elle s'adressa à Vanessa qui ne put lui envoyer qu'une réponse dictée par sa mère . Elle était en effet légèrement souffrante , mais avec cet entêtement curieux et terrible que l'on met à jouer un rôle jusqu'au bout , elle insistait pour qu'on ne dît pas encore la vérité . Stella rentra à la maison , sachant d'instinct comme un animal tourmenté qu'on l'avait trompée ; elle trouva sa mère au lit , souffrant du refroidissement qui devait l'emporter dix jours plus tard .
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Le choc fut total pour Stella ; elle entreprit , par pure beauté d'âme ,de faire tout son possible pour tout le monde ,mais presque en automate . L'avenir ne lui réservait plus rien , le présent , en compagnie d'un beau-père qu'elle connaissait à peine et de quatre enfants dont il fallait s'occuper et qui ne pouvaient guère encore l'aider , était , je pense , constamment pénible . Elle n'avait que vingt-six ans à peine et , en l'espace d'un instant, voilà qu'elle devait renoncer non seulement à la source même de sa vie , mais aussi à tout ce qui lui permettait d'utiliser ses dons de la manière qu'elle préfairait . En vérité la situation eût été pour n'importe qui très difficile ; et pour Stella , avec son manque total de confiance en ses capacités , et notamment son horreur des livres , la tâche était atrocement pénible et presque affolante . Mais enfin , sans cette désolation qui mit à nu son être même et la contraignit à donner toute sa mesure dans une complète solitude , se serait-elle jamais révélée dans toute sa noblesse et sa vérité ?
Tout ce qu'elle devint par la suite eut des assises solides , qu'elle ne devait qu'à elle-même ; plus personne , jamais , ne devait lui servir d'appui ; plus jamais , peut-être , elle n'aima personne comme elle avait aimé sa mère . C'est là qu'est la perte irréparable , quel que soit par ailleurs le gain qui la compense . Dès la mort de ta grand-mère , Stella hérita de toutes les charges que celle-ci avait remplies ; et telle une vieille charette
grinçante , pitoyablement rouillée , mais chargée de jeunes êtres turbulents , notre famille , une fois de plus , reprit péniblement la route .

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La situation de ta grand-mère dans la famille était telle que sa mort non seulement fit disparaître de notre vue le personnage central , mais amena un tel déplacement des rapports humains que la vie pendant longtemps parut incroyable-ment bizarre . Ton grand-père , dans son désir naturel , mais certes imprudent , de faire pour nous tout ce que ta grand-mère avait fait , entreprit de nous donner des leçons ; et renonça pour nous à la moitiè de ses matinées ; vrai sacrifice , mais qui n'améliora pas son humeur . Puis Georges ,
emporté par la marée de l'émotion , tint à inaugurer une amitié plus étroite et plus mûre avec nous ; Gérald lui-même se montra pour un
temps sérieux et sentimental ; et tout autour de ce centre de profonde émotion gravitaient nombre d'amis , soudain conscients d'un désir de participer à notre vie et de leur droit à faire reconnaître la profondeur de leurs sentiments . Quant à Stella , bien que presque
assommée à ce moment-là , elle ne se départit
jamais de sa tranquille attitude d'infinie considération pour les autres , de silence à l'égard de ses propres sentiments mais ce calme même semblait subir,avec indifférence,
un certain nombre d'épreuves , et notamment
comporter une soumission tout à fait injustifiée aux besoins de ton grand-père .Toute consolation qui se présentait , quelle qu'en fût la nature ,elle la lui offrait pour apaiser son angoisse ; elle lui consacrait ses journées ,elle s'évertuait, comme je l'ai déjà dit ,à trouver des personnes qui lui rendraient visite , qui l'aideraient elle -même
dans un de ses innombrables petits plans pour le soulager .

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A bientôt pour la suite ami(e)s poètes et poétesses

Coucou Ami(e)s poètes et poétesses,

Voici déjà un premier extrait ... je m'occuperai des images plus tard les amis car je dois les héberger ailleurs.
Prennez le temps de lire ces textes et surtout, n'hésitez pas à laisser vos impressions suite à votre lecture.
Merci Pour Lily
Bisous Babs

Ce sera vraiment pour toi , Babs . Je te remercie beaucoup pour tout ton travail de recherche d'archives . Incroyable , notre histoire ! Juste pour toi !

Souvent ,en travaillant à mes prétendus romans , j'ai été déconcertée par ce même problème , c'est à dire comment décrire ce que , dans ma sténo personnelle , j'appelle le "non- ête" . Chaque jour contient beaucoup plus de non-être que d'être .Par exemple , il se trouve que hier, mardi 18 Avril , a été une bonne journée ; au-dessus de la moyenne en "être". Il faisait beau ; j'ai pris plaisir à écrire ces premières pages ; j'avais l'esprit débarrassé de la tension d'écrire sur Roger; je suis allée écrire sur le Mount Misery et au bord de la rivière et , sauf que la mer s'était retirée , le paysage , que j'observe toujours très attentivement , était coloré et voilé comme je l'aime . Les saules , je m'en souviens , étaient ...

D'un Arc-en-Ciel , j'ai sauté sur un Nuage puis on m'a offert une immortelle . Et c'est ainsi que je me suis retrouvée au coeur d'un poème , je m'en souviens . Les saules , je m'en souviens , étaient tout empanachés , vert doux et violet ...

Vois-tu comme je suis sage ?

lily of the valley a écrit:: Souvent ,en travaillant à mes prétendus romans , j'ai été déconcertée par ce même problème , c'est à dire comment décrire ce que , dans ma sténo personnelle , j'appelle le "non- ête" . Chaque jour contient beaucoup plus de non-être que d'être .Par exemple , il se trouve que hier, mardi 18 Avril , a été une bonne journée ; au-dessus de la moyenne en "être". Il faisait beau ; j'ai pris plaisir à écrire ces premières pages ; j'avais l'esprit débarrassé de la tension d'écrire sur Roger; je suis allée écrire sur le Mount Misery et au bord de la rivière et , sauf que la mer s'était retirée , le paysage , que j'observe toujours très attentivement , était coloré et voilé comme je l'aime . Les saules , je m'en souviens , étaient ...

Je comprends à demi-mot et me demande si les mots de Virginia Woolf s'expriment à travers ta plume en te lisant

lily of the valley a écrit:: D'un Arc-en-Ciel , j'ai sauté sur un Nuage puis on m'a offert une immortelle . Et c'est ainsi que je me suis retrouvée au coeur d'un poème , je m'en souviens . Les saules , je m'en souviens , étaient tout empanachés , vert doux et violet ...

Voici une belle traversée internettienne où nos routes se sont cotoyées

lily of the valley a écrit:: Vois-tu comme je suis sage ?

Oui tu es bien sage ma Lily de la Vallée .... serais-tu de la vallée d'Avalon ? Petite Reine des mots sunny

Bisous Babs
PS: j'ai cité ce que tu as écris pour pouvoir exprimer clairement ma pensée au moment de ma lecture et aussi essayer de faire en sorte que si quelques poètes ou poétesses de passage sur ce poste puissent comprendre de quoi il retourne lol!

violet sur le bleu . J'ai lu aussi Chaucer avec plaisir ; et j'ai commencé un livre _ les Mémoires de Madame de La Fayette _ qui m'a intéressée. Ces trois moments de l'être distincts furent cependant noyés dans des moments du non-être beaucoup plus nombreux .J'ai déjà oublié de quoi nous avons parlé , Léonard et moi ,pendant le déjeuner et pendant le thé ; même si ce fut une bonne journée ,son agrément a été noyé dans une sorte d'ouate indéfinissable . Il en est toujours ainsi . Une grande part de la journée n'est pas vécue consciemment . On marche, on mange ,on voit des choses , on s'occupe de ce qu'il y a à faire ; l'aspirateur en panne ; commander le dîner; noter les ordres pour Mabel; lessive; faire le dîner; reliure. Lorsque c'est une ...

Lorsque c'est une mauvaise journée , la proportion de cette ouate , de ce non-être est beaucoup plus forte . J'ai eu un accès de fièvre la semaine dernière ; presque toute la journée était du non-être. Le véritable romancier parvient d'une manière ou d'une autre à rendre les deux sortes d'être. Je crois que Jane Austen y arrive ;et Trollope ; peut-être Thackerey ;et Dickens et Tolstoï. Moi, je n'ai jamais été capable de rendre les deux . J'ai essayé _ dans Night and Day et dans Les Années . Mais je laisserai l'aspect littéraire pour l'instant . Quand j'étais enfant ,donc, mes journées ,exactement comme maintenant , contenaient une grande proportion de cette ouate , de ce ...

Merci pour ces extraits gentillement posés sur cette écran Lily ... en lisant je comprend .... je comprend tout .... mais il me manque un détail.
Lequel ? Un d'importance et non des moindres ... la petite précision qui fait que l'ont sais de quoi il retourne à la première lecture : le titre du livre (l'auteur je m'en doute) et surtout l'édition pour que les personnes désirants acquérir cette ouvrage le puissent Wink

Bisous Babs

Babs , tu peux supprimer définitivement ce post . Merci !
THE END

» A LIRE ....